Indications
Iclusig est indiqué chez les patients adultes atteints de
• leucémie myéloïde chronique (LMC) en phase chronique, en phase accélérée ou en phase blastique, qui présentent une résistance au dasatinib ou au nilotinib ou une intolérance au dasatinib ou au nilotinib et pour qui un traitement ultérieur par imatinib n'est pas cliniquement approprié, ou qui expriment la mutation T315I
• ou de leucémie aiguë lymphoblastique à chromosome Philadelphie (LAL Ph+), qui présentent une résistance au dasatinib ou une intolérance au dasatinib et pour qui un traitement ultérieur par imatinib n'est pas cliniquement approprié, ou qui expriment la mutation T315I.
Fonctionnement
Groupe pharmacothérapeutique : agent antinéoplasique, inhibiteur de la protéine-kinase, code ATC : L01XE24
Le ponatinib est un pan-inhibiteur puissant de la protéine BCR-ABL.
Il possède des éléments structurels, notamment une triple liaison carbone-carbone, qui lui confèrent une forte affinité de liaison à la fois à la protéine BCR-ABL native et aux formes mutantes de l'ABL-kinase.
Le ponatinib inhibe l'activité de la tyrosine-kinase du gène ABL et du mutant ABL T315I aux concentrations inhibitrices CI50 de 0,4 et 2,0 nM, respectivement.
Sur des modèles cellulaires, le ponatinib a pu surmonter la résistance à l'imatinib, au dasatinib et au nilotinib médiée par les mutations du domaine kinase de BCR-ABL.
Dans les études de mutagenèse précliniques, il a été déterminé que 40 nM est la concentration de ponatinib qui suffit à inhiber de > 50 % la viabilité des cellules exprimant toutes les BCR-ABL mutantes testées (y compris T315I), et permet de supprimer l'émergence de clones mutants.
Dans un modèle cellulaire accéléré de mutagenèse, aucune mutation de BCR-ABL susceptible de conférer une résistance à 40 nM de ponatinib n'a été détectée.
Le ponatinib a entrainé une réduction de la tumeur et prolongé la survie de souris porteuses de tumeurs exprimant BCR-ABL native ou le mutant ABL T315I.
Aux doses de 30 mg ou plus, les concentrations plasmatiques résiduelles de ponatinib à l'état d'équilibre étaient classiquement supérieures à 21 ng/ml (40 nM).
Aux doses de 15 mg ou plus, 32 des 34 patients (94 %) ont démontré une réduction >= 50 % de l'activité de phosphorylation CRKL, un biomarqueur de l'inhibition de la BCR-ABL, au niveau des cellules mononucléées du sang périphérique.
Le ponatinib inhibe l'activité des autres kinases ayant un rôle clinique notable avec des valeurs de CI50 < 20 nM et a montré une activité inhibitrice sur les kinases RET, FLT3 et KIT ainsi que sur les membres des familles de kinases FGFR, PDGFR et VEGFR dans les modèles cellulaires.
Efficacité et tolérance clinique
La tolérance et l'efficacité d'Iclusig chez des patients atteints de LMC et de LAL Ph+ qui avaient montré une résistance ou une intolérance à un traitement antérieur par un inhibiteur de tyrosine kinase (ITK) ont été évaluées dans le cadre d'un essai à un seul bras, ouvert, international et multicentrique.
Une dose de 45 mg d'Iclusig une fois par jour était administrée à tous les patients, avec la possibilité de réduire progressivement la dose et de la suspendre, puis de la réintroduire et de l'augmenter progressivement.
Les patients étaient répartis dans six cohortes, selon la phase de la maladie (LMC-PC, LMC-PA ou LMC-PB/LAL Ph+), la résistance ou l'intolérance (R/I) au dasatinib ou au nilotinib, et la présence de la mutation T315I.
L'essai est toujours en cours.
Dans le cas de la LMC-PC, la résistance était définie comme la non-obtention d'une réponse hématologique complète (dans les 3 mois), d'une réponse cytogénétique mineure (dans les 6 mois), ou d'une réponse cytogénétique majeure (dans les 12 mois) lorsque traité par le dasatinib ou le nilotinib.
Les patients atteints de LMC-PC en perte de réponse, ou ayant développé une mutation du domaine kinase en l'absence d'une réponse cytogénétique complète, ou dont la maladie a progressé vers une LMC-PA ou une LMC-PB, à tout moment durant le traitement par le dasatinib ou le nilotinib, ont aussi été considérés comme résistants.
Dans le cas de la LMC-PA et de la LMC-PB/LAL Ph+, la résistance était définie soit comme la non-obtention d'une réponse hématologique majeure (LMC-PA dans les 3 mois, LMC-PB/LAL Ph+ dans le mois), la perte d'une réponse hématologique majeure (quel qu'en soit le moment), ou le développement d'une mutation du domaine kinase en l'absence d'une réponse hématologique majeure lorsque sous traitement par le dasatinib ou le nilotinib.
L'intolérance était définie comme l'interruption de la prise du dasatinib ou du nilotinib en raison de toxicités, malgré une prise en charge optimale, et ce en l'absence d'une réponse cytogénétique complète pour les patients LMC-PC, ou d'une réponse hématologique majeure pour les patients atteints de LMC-PA, LMC-PB ou de LAL Ph+.
Le critère d'évaluation primaire de l'efficacité, dans le cas de LMC-PC, était la réponse cytogénétique majeure (MCyR), soit le total des réponses cytogénétiques complète et partielle (CCyR et PCyR).
Les critères d'évaluation secondaires de l'efficacité étaient, dans le cas de la LMC-PC, la réponse hématologique complète (CHR) et la réponse moléculaire majeure (MMR).
Dans les cas de la LMC-PA et de la LMC-PB/LAL Ph+, le critère d'évaluation primaire de l'efficacité était la réponse hématologique majeure (MaHR), définie par une réponse hématologique complète (CHR) ou par l'absence de signes de leucémie (NEL).
Dans ces mêmes pathologies, les critères d'évaluation secondaires d'efficacité étaient la MCyR et la MMR.
Pour tous les patients, les critères secondaires additionnels d'évaluation de l'efficacité incluaient : la MCyR confirmée, le délai d'obtention d'une réponse, la durée de la réponse, la survie sans progression de la maladie et la survie globale.
L'essai avait inclus 449 patients, parmi lesquels 444 avaient satisfait aux critères requis pour l'analyse : 267 patients atteints de LMC-PC (cohorte R/I : n = 203, cohorte T315I : n = 64), 83 patients atteints de LMC-PA (cohorte R/I : n = 65, cohorte T315I : n = 18), 62 patients atteints de LMC-PB (cohorte R/I : n = 38, cohorte T315I : n = 24), et 32 patients atteints de LAL Ph+ (cohorte R/I : n = 10, cohorte T315I : n = 22).
Une MCyR antérieure au minimum (MCyR, MMR ou CMR) au dasatinib ou au nilotinib n'a été obtenue que chez 26 % des patients atteints de LMC-PC et une MaHR antérieure au minimum (MaHR, MCyR, MMR ou CMR) n'a été obtenue que chez 21 % et 24 % des patients atteints de LMC-PA et de LMC-PB/LAL Ph+, respectivement.
Au moment de l'analyse, les patients étaient suivis pendant au moins 6 mois (suivi médian : 10 mois).
Les caractéristiques démographiques initiales sont décrites dans le Tableau 5 ci-dessous.
Tableau 5 Caractéristiques démographiques et pathologiques
Caractéristiques des patients à l'inclusion
Population totale pour la tolérance
N = 449
Age
Médiane, en années (intervalle)
59 (18 - 94)
Sexe, n (%)
Masculin
238 (53 %)
Race, n (%)
Asiatique
59 (13 %)
Noire/Afro-américaine
25 (6 %)
Caucasienne
352 (78 %)
Autre
13 (3 %)
Indice fonctionnel ECOG, n (%)
ECOG = 0 ou 1
414 (92 %)
Antécédents pathologiques
Délai médian écoulé entre le diagnostic et l'administration de la première dose, en années (intervalle)
6,09 (0,33 - 28,47)
Résistance à un ITK antérieur*, n (%)
374(88 %)
Thérapie antérieure par ITK - nombre de schémas thérapeutiques, n (%)
1
32 (7 %)
2
155 (35 %)
>= 3
262 (58 %)
Mutation de BCR-ABL détectée à l'inclusion, n (%)
Aucune
198 (44 %)
1
192 (43 %)
>= 2
54 (12 %)
* des 427 patients ayant rapporté avoir déjà été traités par un ITK (dasatinib ou nilotinib).
Dans l'ensemble, 55 % des patients avaient exprimé une ou plusieurs mutation(s) du domaine kinase de la BCR-ABL à l'inclusion, les plus fréquentes étant : T315I (29 %), F317L (8 %), E255K (4 %) et E359V (4 %).
Chez 67 % des patients atteints de LMC-PC de la cohorte R/I, aucune mutation n'avait été détectée lors de l'inclusion.
Au moment de l'analyse, la durée médiane du traitement par Iclusig était de 281 jours chez les patients atteints de LMC-PC, de 286 jours chez ceux atteints de LMC-PA, 89 jours chez ceux atteints de LMC-PB, et 81 jours chez ceux atteints de LAL Ph+.
Les résultats d'efficacité sont résumés dans le Tableau 6, le Tableau 7 et le Tableau 8.
Tableau 6 Efficacité d'Iclusig chez les patients résistants ou intolérants atteints de LMC en phase chronique
Globale (N = 267)
Résistants ou Intolérants
Cohorte R/I (N = 203)
Cohorte T315I (N = 64)
Réponse cytogénétique
Majeure (MCyR) a
%
54 %
49 %
70 %
(IC à 95 %)
(48-60)
(42-56)
(58-81)
Complète (CCyR)
%
44 %
37 %
66 %
(IC à 95 %)
(38-50)
(31-44)
(53-77)
Réponse moléculaire majeure b
%
30 %
23 %
50 %
(IC à 95 %)
(24-36)
(18-30)
(37-63)
a Le critère principal d'évaluation pour les cohortes atteintes de LMC-PC était la MCyR, qui associe à la fois les réponses cytogénétiques complète (aucune cellule Ph+ détectable) et partielle (1 à 35 % de cellules Ph+).
b Mesurée dans le sang périphérique.
Définie comme un rapport <= 0,1 % des transcrits BCR-ABL/ABL sur l'échelle internationale (IS) (soit <= 0,1 % BCR-ABLIS ; les patients doivent avoir le transcrit b2a2/b3a2 (p210)), dans le sang périphérique, mesuré par PCR quantitative reverse (qRT PCR).
Les patients atteints de LMC-PC qui avaient reçu moins d'ITK antérieurs ont obtenu de meilleures réponses cytogénétique, hématologique et moléculaire.
Parmi les patients atteints de LMC-PC ayant déjà été traités avec un, deux ou trois ITK, 81 % (13/16), 61 % (65/105) et 46 % (66/143) ont obtenu une MCyR pendant leur traitement par Iclusig, respectivement.
Parmi les patients atteints de LMC-PC chez qui aucune mutation n'avait été détectée à l'inclusion, 46 % (63/136) ont obtenu une MCyR.
Pour chacune des mutations de BCR-ABL détectées chez plus d'un patient atteint de LMC-PC à l'inclusion, une MCyR a été obtenue suite au traitement par Iclusig.
Chez les patients atteints de LMC-PC qui ont obtenu une MCyR, le délai médian d'obtention de la réponse était de 84 jours (intervalle : 49 à 334 jours) et chez ceux ayant obtenu une MMR, le délai médian d'obtention de la réponse était de 167 jours (intervalle : 55 à 421 jours).
Au moment de la soumission du rapport d'étude, les durées médianes de MCyR et de MMR n'avaient pas encore été atteintes.
D'après les estimations selon la méthode de Kaplan-Meier, 91 % (IC à 95 % : [85 % - 95 %]) des patients atteints de LMC-PC (durée médiane de traitement : 421 jours) qui ont obtenu une MCyR et 81 % (IC à 95 % : [70 % - 88 %]) des patients atteints de LMC-PC ayant obtenu une MMR devraient maintenir cette réponse à 12 mois.
Tableau 7 Efficacité d'Iclusig chez les patients atteints de LMC en phase avancée résistants ou intolérants
LMC en phase accélérée
LMC en phase blastique
Globale
(N = 83)
Résistants ou Intolérants
Globale
(N = 62)
Résistants ou Intolérants
Cohorte R/I
(N = 65)
Cohorte T315I
(N = 18)
Cohorte
R/I
(N = 38)
Cohorte T315I
(N = 24)
Taux de réponse hématologique
Majeurea (MaHR)
%
(IC à 95 %)
58 %
(47-69)
60 %
(47-72)
50 %
(26-74)
31 %
(20-44)
32 %
(18-49)
29 %
(13-51)
Complèteb (CHR)
%
(IC à 95 %)
47 %
(36-58)
46 %
(34-49)
50 %
(26-74)
21 %
(12-33)
24 %
(11-40)
17 %
(5-37)
Réponse cytogénétique majeurec
%
(IC à 95 %)
39 %
(28-50)
34 %
(23-47)
56 %
(31-79)
23 %
(13-35)
18 %
(8-34)
29 %
(13-51)
a Le critère principal d'évaluation pour les cohortes LMC-PA et LMC-PB/LAL Ph+ était la MaHR, qui associe les réponses hématologiques complètes, sans signe de leucémie.
b CHR : GB (nombre de leucocytes) <= LSN adoptée par l'établissement, PNN (nombre absolu de polynucléaires neutrophiles) >= 1000/mm3, nombre de plaquettes sanguines >= 100 000/mm3, absence de cellules blastiques ou de promyélocytes dans le sang périphérique, <= 5 % de cellules blastiques dans la moelle osseuse, < 5 % de myélocytes plus métamyélocytes dans le sang périphérique, < 5 % de basophiles dans le sang périphérique, aucune atteinte extramédullaire (y compris absence d'hépatomégalie ou de splénomégalie).
c La MCyR associe les réponses cytogénétiques à la fois complète (aucune cellule Ph+ détectable) et partielle (1 à 35 % de cellules Ph+).
Tableau 8 Efficacité d'Iclusig chez les patients atteints LAL Ph+ résistants ou intolérants
Globale
(N = 32)
Résistants ou Intolérants
Cohorte R/I
(N = 10)
Cohorte T315I
(N = 22)
Taux de réponse hématologique
Majeurea (MaHR)
%
(IC à 95 %)
41 %
(24-59)
50 %
(19-81)
36 %
(17-59)
Complèteb (CHR)
%
(IC à 95 %)
34 %
(19-53)
40 %
(12-73)
32 %
(14-55)
Réponse cytogénétique majeurec
%
(IC à 95 %)
47 %
(29-65)
60 %
(26-88)
41 %
(21-64)
a Le critère principal d'évaluation pour les cohortes LMC-PA et LMC-PB/LAL Ph+ était la MaHR, qui associe les réponses hématologiques complètes, sans signe de leucémie.
b CHR : GB (nombre de leucocytes) < LSN adoptée par l'établissement, PNN (nombre absolu de polynucléaires neutrophiles) >= 1000/mm3, nombre de plaquettes sanguines >= 100 000/mm3, absence de cellules blastiques ou de promyélocytes dans le sang périphérique, <= 5 % de cellules blastiques dans la moelle osseuse ,< 5 % de myélocytes plus métamyélocytes dans le sang périphérique, < 5 % basophiles dans le sang périphérique, aucune atteinte extramédullaire (y compris absence d'hépatomégalie ou de splénomégalie).
c La MCyR associe les réponses cytogénétiques à la fois complète (aucune cellule Ph+ détectable) et partielle (1 à 35 % de cellules Ph+).
Le délai médian d'obtention de la MaHR chez les patients atteints de LMC-PA, de LMC-PB et de LAL Ph+ était respectivement de 21 jours (intervalle : 12 à 176 jours), 29 jours (intervalle : 12 à 113 jours), et 20 jours (intervalle : 11 à 168 jours).
La durée médiane de la MaHR, dans le cas des patients atteints de LMC-PA (durée médiane du traitement : 446 jours), de LMC-PB (durée médiane du traitement : 89 jours) et de LAL Ph+ (durée médiane du traitement : 81 jours), a été estimée respectivement à 11,8 mois (intervalle : 1,2 à 21,5+ mois), 4,7 mois (intervalle : 1 à 19,6+ mois), et 3,2 mois (intervalle : 1,8 à 13,8+ mois).
L'activité anti-leucémique d'Iclusig a également été évaluée dans le cadre d'une étude de phase I avec escalade de dose, dans laquelle 65 patients atteints de LMC et de LAL Ph+ ont été inclus ; l'étude est toujours en cours.
Sur les 43 patients atteints de LMC-PC, 31 ont obtenu une MCyR avec une durée médiane du suivi de 25,3 mois (intervalle : 1,7 à 38,4 mois).
Au moment de la soumission du rapport d'étude, 25 patients atteints de LMC-PC avaient obtenu une MCyR (la durée médiane de la MCyR n'avait pas été atteinte).
Électrophysiologie cardiaque
Le potentiel d'allongement de l'intervalle QT par Iclusig a été étudié chez 39 patients leucémiques qui ont reçu 30 mg, 45 mg ou 60 mg d'Iclusig une fois par jour.
Des ECG en série, en trois exemplaires, ont été recueillis en début d'étude et à l'état d'équilibre pour évaluer l'effet du ponatinib sur les intervalles QT.
Aucun changement cliniquement significatif n'a été détecté au niveau de l'intervalle QTc moyen durant l'étude, par rapport à la valeur initiale (soit > 20 ms).
En outre, les modèles pharmacocinétiques-pharmacodynamiques n'ont mis aucun lien exposition-effet en évidence, avec un changement QTcF moyen estimé de -6,4 ms (intervalle de confiance supérieur -0,9 ms) à la Cmax dans le cas du groupe recevant 60 mg.
Population pédiatrique
L'Agence européenne du médicament a levé l'obligation de soumettre les résultats des études réalisées avec Iclusig chez les enfants de la naissance à moins d'1 an, dans le cas de la LMC et de la LAL Ph+.
L'Agence européenne du médicament a différé l'obligation de soumettre les résultats des études réalisées avec Iclusig chez les patients pédiatriques de 1 an à moins de 18 ans dans le cas de la LMC et de la LAL Ph+ (voir rubrique Posologie et mode d'administration pour les informations relatives à l'usage en pédiatrie).