Fonctionnement
Classe pharmacothérapeutique : Agent immunomodulateur. Code ATC : L04AX04.
Mécanisme d'action
Le mécanisme d'action du lénalidomide s'appuie sur des propriétés anti-néoplasiques, anti-angiogènes, pro-érythropoïétiques, et immunomodulatrices. En particulier, le lénalidomide inhibe la prolifération de certaines cellules malignes hématopoïétiques (y compris les plasmocytes malins de MM et celles présentant des délétions sur le chromosome 5), renforce l'immunité impliquant les lymphocytes T et les cellules tueuses naturelles (NK) et accroît le nombre des cellules NKT, inhibe l'angiogenèse en bloquant la migration et l'adhésion des cellules endothéliales et la formation des micro-vaisseaux, amplifie la production foetale d'hémoglobine par les cellules souches hématopoïétiques CD34+, et inhibe la production des cytokines pro-inflammatoires (TNF-alpha et IL-6, par exemple) par les monocytes.
Dans les SMD del 5q, le lénalidomide a inhibé sélectivement le clone anormal en augmentant l'apoptose des cellules présentant la délétion 5q.
Efficacité clinique et tolérance
Myélome multiple
L'efficacité et la sécurité d'emploi du lénalidomide ont été évaluées lors de deux études de phase III, multicentriques, randomisées, en double aveugle, contrôlées par placebo, en groupes parallèles (MM-009 et MM-010), ayant comparé l'association lénalidomide/dexaméthasone à la dexaméthasone en monothérapie chez des patients ayant déjà été traités, atteints de myélome multiple. Parmi les 353 patients des études MM-009 et MM-010 ayant reçu l'association lénalidomide/dexaméthasone, 45,6 % étaient âgés de 65 ans ou plus. Sur l'ensemble des 704 patients évalués lors des études MM-009 et MM-010, 44,6 % étaient âgés de 65 ans ou plus.
Lors des deux études, les patients du groupe lénalidomide/dexaméthasone (lén/dex) ont pris 25 mg de lénalidomide par voie orale en une prise par jour les jours 1 à 21 et une gélule de placebo correspondante en une prise par jour les jours 22 à 28 de chaque cycle de 28 jours. Les patients du groupe placebo/dexaméthasone (placebo/dex) ont pris 1 gélule placebo les jours 1 à 28 de chaque cycle de 28 jours. Les patients des deux groupes ont pris 40 mg de dexaméthasone par voie orale en une prise par jour les jours 1 à 4, 9 à 12 et 17 à 20 de chaque cycle de 28 jours pendant les 4 premiers cycles de 28 jours. La dose de dexaméthasone a ensuite été réduite à 40 mg par voie orale en une prise par jour les jours 1 à 4 uniquement des cycles suivants de 28 jours (après les 4 premiers cycles du traitement). Lors des deux études, le traitement devait être poursuivi jusqu'à la progression de la maladie. Dans les deux études, des ajustements posologiques étaient autorisés en fonction des résultats cliniques et des analyses biologiques.
Le critère d'évaluation principal d'efficacité des deux études était le temps sans progression (time to progression, TTP). Au total, 353 patients ont été évalués dans le cadre de l'étude MM-009, 177 dans le groupe lénalidomide/dexaméthasone et 176 dans le groupe placebo/dexaméthasone et, au total, 351 patients ont été évalués dans le cadre de l'étude MM-010, 176 dans le groupe lénalidomide/dexaméthasone et 175 dans le groupe placebo/dexaméthasone.
Lors des deux études, les caractéristiques démographiques et pathologiques initiales des patients étaient comparables dans les deux groupes (lénalidomide/dexaméthasone et placebo/dexaméthasone). Les populations étudiées présentaient dans les deux cas un âge médian de 63 ans, avec une proportion hommes/femmes comparable. Les indices de performance tels que définis par l'ECOG (Eastern Cooperative Oncology Group) étaient comparables dans les deux groupes, comme l'étaient le nombre et le type des traitements antérieurs.
Les analyses intermédiaires préalablement planifiées pour les deux études ont montré que l'association lénalidomide/dexaméthasone donnait un résultat significativement supérieur en termes statistiques (p < 0,00001) à celui obtenu par la dexaméthasone en monothérapie sur le critère principal d'évaluation de l'efficacité, le TTP (suivi médian de 98,0 semaines). Les taux de réponses complètes et de réponses globales lénalidomide/dexaméthasone ont également été significativement supérieurs à ceux du groupe placebo/dexaméthasone dans les deux études. Les résultats de ces analyses ont eu pour conséquence la levée de l'aveugle, dans les deux études, de façon à ce que les patients du groupe placebo/dexaméthasone puissent bénéficier du traitement par l'association lénalidomide/dexaméthasone.
Une analyse de l'efficacité après un suivi prolongé a été menée avec un suivi médian de 130,7 semaines. Le tableau 1 récapitule les résultats d'efficacité issus des analyses de suivi des études MM-009 et MM-010 groupées.
Dans cette analyse du suivi prolongé, le TTP médian était de 60,1 semaines (IC à 95 % : 44,3-73,1) chez les patients traités par lénalidomide/dexaméthasone (N = 353) contre 20,1 semaines (IC à 95 % : 17,7-20,3) chez les patients traités par placebo/dexaméthasone (N = 351). La durée médiane de survie sans progression de la maladie a été de 48,1 semaines (IC à 95 % : 36,4-62,1) chez les patients traités par lénalidomide/dexaméthasone contre 20,0 semaines (IC à 95 % : 16,1 -20,1) chez les patients traités par placebo/dexaméthasone. La durée médiane de traitement a été de 44,0 semaines (min: 0,1 ; max: 254,9) dans le bras lénalidomide/dexaméthasone, et de 23,1 semaines (min: 0,3 ; max: 238,1) dans le bras placebo/dexaméthasone. Dans les deux études, les taux de réponses complètes (RC), de réponses partielles (RP) et de réponses globales (RC+RP) sont restés significativement plus élevés dans le groupe lénalidomide/dexaméthasone que dans le groupe placebo/dexaméthasone. Le taux médian de survie globale dans l'analyse du suivi prolongé des études groupées est de 164,3 semaines (IC à 95 % : 145,1 -192,6) chez les patients traités par lénalidomide/dexaméthasone contre 136,4 semaines (IC à 95 % : 113,1-161,7) chez les patients ayant reçu l'association placebo/dexaméthasone. Bien que 170 des 351 patients randomisés dans le groupe placebo/dexaméthasone aient finalement reçu le traitement par lénalidomide après progression de la maladie ou une fois l'insu levé, l'analyse groupée de la survie globale a permis de montrer une différence statistiquement significative concernant la survie en faveur de l'association lénalidomide/dexaméthasone par rapport à l'association placebo/dexaméthasone (hazard ratio = 0,833 ; IC à 95 % : 0,687-1,009 ; p = 0,045).
Tableau 1 : Résumé des résultats des analyses de l'efficacité à la date de fin de collecte des données après suivi prolongé - études MM-009 et MM-010 regroupées (dates de fin de collecte des données respectives, 23 juillet 2008 et 2 mars 2008)
Critère d'évaluation
lén/dex
(N = 353)
placebo/dex
(N = 351)
Délai avant événement
Hazard ratio [IC à 95 %],
pa
Temps sans progression médiane [IC à 95 %], semaines
60,1
[44,3 ; 73,1]
20,1
[17,7 ; 20,3]
0,350 [0,287 ; 0,426],
p < 0,001
Survie sans progression médiane [IC à 95 %], semaines
48,1
[36,4 ; 62,1]
20,0
[16,1 ; 20,1]
0,393 [0,326 ; 0,473],
p < 0,001
Survie globale médiane [IC à 95 %], semaines
Taux de survie globale à 1 an
164,3
[145,1 ; 192,6]
82 %
136.4
[113,1 ; 161,7]
75 %
0,833 [0,687 ; 1,009],
p = 0,045
Taux de réponse
Odds ratio [IC à 95 %], pb
Réponses globales [n, %]
Réponses complètes [n, %]
212 (60,1)
58 (16,4)
75 (21,4)
11 (3,1)
5,53 [3,97 ; 7,71], p < 0,001 6,08 [3,13 ; 11,80], p < 0,001
a : Test bilatéral du log-rank comparant les courbes de survie entre les groupes de traitement.
b : Test bilatéral du Ç2 corrigé en fonction de la continuité.
Etude exploratoire
Une étude de phase III, multicentrique, randomisée, en ouvert, a été menée auprès de 445 patients atteints de myélome multiple récemment diagnostiqué ; 222 patients ont été randomisés dans le groupe lénalidomide / faible dose de dexaméthasone et 223 dans le groupe lénalidomide / dose standard de dexaméthasone. Les patients randomisés dans le groupe lénalidomide / dose standard de dexaméthasone ont reçu 25 mg de lénalidomide par jour, du jour 1 au jour 21 des cycles de 28 jours plus 40 mg de dexaméthasone par jour les jours 1 à 4, 9 à 12 et 17 à 20 de chaque cycle de 28 jours, pendant les quatre premiers cycles. Les patients randomisés dans le groupe lénalidomide / faible dose de dexaméthasone ont reçu 25 mg de lénalidomide par jour, les jours 1 à 21 de chaque cycle de 28 jours et une faible dose de dexaméthasone, 40 mg/jour les jours 1, 8, 15 et 22 de chaque cycle de 28 jours. Dans le groupe lénalidomide / faible dose de dexaméthasone, 20 patients (9,1 %) ont eu au moins une interruption de traitement contre 65 patients (29,3 %) dans le groupe lénalidomide / dose standard de dexaméthasone.
Une analyse a posteriori a montré que dans la population de patients atteints d'un myélome multiple récemment diagnostiqué, avec un suivi médian de 72,3 semaines, la mortalité observée dans le groupe lénalidomide / faible dose de dexaméthasone (6,8 % (15/220)) était plus faible que celle dans le groupe lénalidomide / dose standard de dexaméthasone (19,3 % (43/223)).
Cependant, avec un suivi plus long, la différence de survie globale en faveur de la faible dose de dexaméthasone a tendance à diminuer.
Ces résultats doivent être interprétés avec précaution dans la mesure où la population de patients diffère de celle correspondant à l'indication autorisée.
Syndromes myélodysplasiques
L'efficacité et la tolérance du lénalidomide ont été évaluées dans deux études principales menées chez des patients présentant une anémie avec dépendance transfusionnelle due à un syndrome myélodysplasique à risque faible ou intermédiaire 1 associé à une anomalie cytogénétique de type délétion 5q, avec ou sans autres anomalies cytogénétiques : une étude de phase III multicentrique, randomisée en double aveugle, placebo contrôle, de trois bras, évaluant deux doses orales de lénalidomide (10 mg et 5 mg) versus placebo (MDS-004) et une étude de phase II multicentrique du traitement en ouvert par le lénalidomide (10 mg) uniquement (MDS-003).
Les résultats présentés ci-dessous représentent la population en intention-de-traiter des études MDS-003 et MDS-004 ; les résultats dans la sous-population de patients porteurs de l'anomalie del 5q isolée sont également présentés séparément (voir rubrique Indications thérapeutiques pour l'indication autorisée).
Dans l'étude MDS-004, 205 patients ont été randomisés, selon un rapport égal, pour recevoir le lénalidomide 10 mg, le lénalidomide 5 mg ou le placebo : le critère principal d'efficacité consistait en une comparaison des taux de réponse d'indépendance transfusionnelle dans les bras lénalidomide 10 mg et 5 mg par rapport au bras placebo (phase en double aveugle de 16 à 52 semaines et extension en ouvert allant jusqu'à 156 semaines au total). Le traitement devait être arrêté chez lez patients qui ne présentaient pas au moins une réponse érythroïde mineure après 16 semaines. Les patients présentant une réponse érythroïde au moins mineure pouvaient poursuivre le traitement jusqu'à la rechute, la progression de la maladie ou une toxicité inacceptable. Les patients qui avaient reçu initialement le placebo ou le lénalidomide 5 mg et qui n'avaient pas obtenu une réponse érythroïde au moins mineure après 16 semaines de traitement pouvaient passer du placebo au lénalidomide 5 mg ou poursuivre le traitement par le lénalidomide à une dose plus élevée (de 5 mg à 10 mg).
Dans l'étude MDS-003, au cours de laquelle 148 patients ont reçu le lénalidomide à la dose de 10 mg, l'analyse du critère principal consistait à évaluer l'efficacité du traitement par le lénalidomide sur l'amélioration hématopoïétique chez les patients présentant un syndrome myélodysplasique à risque faible ou intermédiaire 1.
Tableau 2 : Synthèse des résultats d'efficacité - Etudes MDS-004 (phase en double aveugle) et MDS-003, population en intention-de-traiter
Critère d'évaluation
MDS-004
N = 205
MDS-003
N = 148
10 mg
N = 69
5 mg
N = 69
Placebo*
N = 67
10 mg
N = 148
Indépendance transfusionnelle
(>= 182 jours) #
38 (55,1 %)
24 (34,8 %)
4 (6,0 %)
86 (58,1 %)
Indépendance transfusionnelle
(>= 56 jours) #
42 (60,9 %)
33 (47,8 %)
5 (7,5 %)
97 (65,5 %)
Délai médian jusqu'à l'indépendance transfusionnelle (semaines)
4,6
4,1
0,3
4,1
Durée médiane d'indépendance transfusionnelle (semaines)
NR00
NR
NR
114,4
Augmentation médiane de l'Hb, g/dl
6,4
5,3
2,6
5,6
Patients traités par le lénalidomide 10 mg pendant 21 jours de cycles de 28 jours
Patients traités par le lénalidomide 5 mg pendant 28 jours de cycles de 28 jours
* La majorité des patients sous placebo a arrêté le traitement en double aveugle après 16 semaines en raison d'un manque d'efficacité avant d'entrer dans la phase en ouvert
# Associée à une augmentation de l'Hb >= 1g/dl
Non atteinte (la médiane n'a pas été atteinte)
Dans l'étude MDS-004, le pourcentage de patients atteints d'un syndrome myélodysplasique ayant atteint le critère principal d'indépendance transfusionnelle (> 182 jours) a été significativement plus élevé avec le lénalidomide 10 mg qu'avec le placebo (55,1 % versus 6,0 %). Chez les 47 patients porteurs d'une anomalie cytogénétique del 5q isolée et traités par le lénalidomide 10 mg, 27 patients (57,4 %) ont obtenu l'indépendance vis-à-vis des transfusions de globules rouges.
Dans le bras lénalidomide 10 mg, le délai médian jusqu'à l'indépendance transfusionnelle a été de 4,6 semaines. La durée médiane d'indépendance transfusionnelle n'a été atteinte dans aucun bras de traitement, mais elle devrait être supérieure à 2 ans chez les patients traités par le lénalidomide. L'augmentation médiane du taux d'hémoglobine (Hb) depuis le début du traitement a été de 6,4 g/dl dans le bras 10 mg.
Les autres critères d'évaluation de l'étude étaient la réponse cytogénétique (dans le bras 10 mg, des réponses cytogénétiques majeures et mineures ont été observées chez respectivement 30,0 % et 24,0 % des patients), l'évaluation de la qualité de vie liée à la santé (QdVLS) et la progression en leucémie aiguë myéloblastique. Les résultats en termes de réponse cytogénétique et de qualité de vie ont concordé avec les résultats du critère principal et étaient en faveur du traitement par le lénalidomide par rapport au placebo.
Dans l'étude MDS-003, un pourcentage élevé (58,1 %) de patients atteints de syndromes myélodysplasiques traités par le lénalidomide 10 mg a atteint l'indépendance transfusionnelle (> 182 jours). Le délai médian jusqu'à l'indépendance transfusionnelle a été de 4,1 semaines. La durée médiane d'indépendance transfusionnelle a été de 114,4 semaines. L'augmentation médiane du taux d'hémoglobine (Hb) a été de 5,6 g/dl. Des réponses cytogénétiques majeures et mineures ont été observées chez 40,9 % et 30,7 % des patients respectivement.
Un pourcentage élevé de patients inclus dans les études MDS-003 (72,9 %) et MDS-004 (52,7 %) avaient reçu antérieurement des agents stimulant l'érythropoïèse.
L'Agence européenne des médicaments a accordé une dérogation à l'obligation de soumettre les résultats d'études réalisées avec Revlimid dans tous les sous-groupes de la population pédiatrique dans l'indication du myélome multiple et des syndromes myélodysplasiques (voir rubrique Posologie et mode d'administration pour les informations concernant l'usage pédiatrique).
Indications
Myélome multiple
Revlimid est indiqué, en association avec la dexaméthasone, pour le traitement du myélome multiple chez les patients adultes ayant déjà reçu au moins un traitement antérieur.
Syndromes myélodysplasiques
Revlimid est indiqué pour le traitement des patients présentant une anémie avec dépendance transfusionnelle due à un syndrome myélodysplasique à risque faible ou intermédiaire 1 associé à une anomalie cytogénétique de type délétion 5q isolée, lorsque les autres options thérapeutiques sont insuffisantes ou inappropriées.
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