Fonctionnement
Classe pharmacothérapeutique : agents antinéoplasiques, inhibiteur de protéine kinase ; Code ATC : L01XE21
Mécanisme d'action et effets pharmacodynamiques
Le régorafénib est un agent oral de désactivation tumorale qui inhibe de façon importante de multiples protéines kinases, y compris celles impliquées dans l'angiogenèse tumorale (VEGFR1, 2, 3, TIE2), l'oncogenèse (KIT, RET, RAF-1, BRAF, BRAFV600E) et le micro-environnement tumoral (PDGFR, FGFR). Dans les études précliniques, le régorafénib a fait preuve d'une activité anti-tumorale importante sur un large spectre de modèles tumoraux, notamment des modèles de tumeur colorectale, activité due à ses effets à la fois anti-angiogéniques et antiprolifératifs. En outre, le régorafénib a présenté des effets anti-métastatiques in vivo. Les principaux métabolites humains (M-2 et M-5) ont fait preuve d'une efficacité similaire à celle du régorafénib chez les modèles in vitro aussi bien qu in vivo.
Efficacité et sécurité clinique
L'efficacité et la sécurité cliniques de Stivarga ont été évaluées dans une étude internationale de phase III, multicentrique, randomisée, en double aveugle, contrôlée versus placebo (CORRECT), chez des patients atteints de cancer colorectal métastatique ayant présenté une progression de la maladie après l'échec de traitements standards.
Le principal critère d'évaluation de l'efficacité était la Survie Globale (SG). Les critères d'évaluation secondaires étaient la Survie Sans Progression (SSP), le taux de réponse tumorale objective et le taux de contrôle de la maladie.
Au total, 760 patients ont été randomisés selon un ratio de 2/1 pour recevoir soit 160 mg de régorafénib (4 comprimés de Stivarga contenant chacun 40 mg de régorafénib) par voie orale une fois par jour (N = 505) associé aux Meilleurs Soins de Support (MSS), soit le placebo correspondant (N = 255) associé aux MSS, pendant 3 semaines suivies d'une semaine de pause sans traitement. La dose quotidienne moyenne de régorafénib reçue a été de 147 mg.
Les patients ont poursuivi le traitement jusqu'à progression de la maladie ou apparition d'une toxicité inacceptable. Une analyse intermédiaire planifiée de l'efficacité a été réalisée après la survenue de 432 décès. L'aveugle a été levé dans cette étude une fois que le seuil d'efficacité prédéfini a été franchi dans cette analyse intermédiaire planifiée de la SG.
Parmi les 760 patients randomisés, l'âge médian était de 61 ans, 61 % étaient de sexe masculin, 78 % étaient caucasiens et tous les patients présentaient en début d'étude un indice de performance (IP) ECOG de 0 ou 1. Un IP >= 2 a été rapporté au cours du traitement par Stivarga chez 11,4 % des patients. La valeur médiane de la durée du traitement et de la dose quotidienne, ainsi que les taux de modification posologique et de réduction de la dose ont été similaires à ceux observés chez les patients qui présentaient un IP >= 2 et recevaient le placebo (8,3 %). Les patients qui présentaient un IP >= 2 ont pour la plupart interrompu le traitement pour cause de progression de la maladie. La localisation primitive de la maladie était le côlon (65 %), le rectum (29 %) ou les deux (6 %). Une mutation KRAS a été rapportée chez 57 % des patients à l'inclusion dans l'étude.
La plupart des patients (52 %) avaient déjà été traités en 3e intention ou moins pour leur maladie métastatique. Les traitements comprenaient une chimiothérapie à base de fluoropyrimidine, des traitements par anti-VEGF et, en cas de gène KRAS de type sauvage, des traitements par anti-EGFR.
L'ajout de Stivarga aux MSS a été associé à une survie significativement plus longue par comparaison avec le placebo plus MSS, avec un hazard ratio de 0,774 (p = 0,005178 pour le test du log-rank stratifié) et une SG médiane de 6,4 mois vs. 5,0 mois [IC à 95 % : 0,636-0,942] (voir le tableau 5). La SSP a été significativement plus longue chez les patients traités par Stivarga plus MSS (hazard ratio: 0,494 ; p < 0,000001 ; voir le tableau 5). Le taux de réponse (réponse complète ou réponse partielle) a été respectivement de 1 % et 0,4 % chez les patients ayant reçu Stivarga et le placebo. Le taux de contrôle de la maladie (réponse complète ou partielle ou maladie stable) a été significativement plus élevé chez les patients traités par Stivarga (41,0 % vs. 14,9 %, p < 0,000001).
Tableau 5 : Résultats d'efficacité de l'étude CORRECT
Paramètre d'efficacité
Hazard ratio*
(IC à 95 %)
Valeur de p (unilatérale)
Médiane (IC à 95 %)
Stivarga plus MSS
(N = 505)
Placebo plus
MSS
(N = 255)
Survie globale médiane
0,774
(0,636 ; 0,942)
0,005178
6,4 mois
(5,9 ; 7,3)
5,0 mois
(4,4 ; 5,8)
Survie sans progression médiane**
0,494
(0,419 ; 0,582)
< 0,000001
1,9 mois
(1,9 ; 2,1)
1,7 mois
(1,7 ; 1,7)
* Un Hazard ratio < 1 est en faveur de Stivarga
** d'après l'évaluation de la réponse tumorale par l'investigateur
Patients exposés au risque
Régorafénib 160 mg
452
352
187
93
33
7
Placebo
22 I
150
75
32
9
3
Les analyses en sous-groupe de la survie globale et de la survie sans progression en fonction de l'âge (< 65 ans ; >= 65 ans), du genre, de l'indice de performance ECOG, du site primaire de la maladie, du délai depuis le premier diagnostic des métastases, des traitements anticancéreux antérieurs, des lignes antérieures de traitements des métastases, et de la mutation KRAS ont montré un effet du traitement en faveur du régorafénib par rapport au placebo.
Les résultats des analyses en sous-groupe en fonction du statut historique mutationnel KRAS ont montré un effet du traitement sur la SG en faveur du régorafénib par rapport au placebo chez les patients ayant une tumeur exprimant le gène KRAS non-muté (de type sauvage) alors qu'un effet numériquement plus faible a été rapporté chez les patients ayant une tumeur exprimant le gène KRAS muté ; l'effet du traitement sur la SSP a été observé en faveur du régorafénib quel que soit le statut mutationnel KRAS. Le hazard ratio (IC à 95%) pour la SG était 0,653 (0,476 à 0,895) chez les patients ayant une tumeur exprimant le gène KRAS de type sauvage et de 0,867 (0,670 à 1,123) chez les patients ayant une tumeur exprimant le gène KRAS muté, sans mise en évidence d'une hétérogénéité de l'effet du traitement (test d'interaction non significatif). Le hazard ratio (IC à 95%) de la SSP était de 0,475 (0,362 to 0,623) chez les patients ayant une tumeur exprimant le gène KRAS de type sauvage et de 0,525 (0,425 à 0,649) chez les patients ayant une tumeur exprimant le gène KRAS muté.
Population pédiatrique
L'Agence européenne des médicaments a accordé une dérogation à l'obligation de soumettre les résultats d'études réalisées avec Stivarga dans tous les sous-groupes de la population pédiatrique, dans le traitement de l'adénocarcinome du côlon et du rectum (voir rubrique Posologie et mode d'administration pour les informations concernant l'usage pédiatrique).
Indications
Régorafénib est indiqué dans le traitement des patients adultes atteints d'un cancer colorectal métastatique (CCRm), en échec de chimiothérapie à base de fluoropyrimidine, d'un traitement par anti-VEGF ou, par une anti-EGFR (si le cancer exprime le gène KRAS non muté [type sauvage]), ou en cas de contre indication à ces traitements.
Les données cliniques reposent sur une étude de phase III dans laquelle n'étaient inclus que des patients ayant un ECOG <= 1.